jeudi 15 juin 2006

Médéric Collignon "Jus de Bocse" @ Le Triton, samedi 10 juin 2006

Retour au jazz samedi soir avec le concert du Jus de Bocse de Médéric Collignon autour de la musique de Miles Davis. Pour l'occasion, le quartet composé de Franck Woste au Fender Rhodes, Frédéric Chiffoleau à la contrebasse et Philippe Gleizes à la batterie, était complété par une section de quatre cors qui donnait une petite couleur orchestrale fort bienvenue à l'ensemble. Qui dit Miles et orchestre dit Gil Evans, et le matériau du premier set alla tout naturellement puiser dans le répertoire de Porgy & Bess et les arrangements que Gil Evans en a fait. Toutefois, c'est par un clin d'oeil à Messiaen que le concert a commencé. Un morceau de celui-ci jouant à l'orgue joué par des cuivres était diffusé pendant que les musiciens présents jouaient dessus, après avoir tout de même pris soin de nous laisser apprécier longuement l'oeuvre de l'organiste seul. Après une excellente version du Gone de Gil Evans, quasi rock par l'énergie déployée par Médéric Collignon au cornet et surtout Philippe Gleizes, toujours aussi brutal à la batterie, le premier set s'est achevé sur Mood, un morceau de Ron Carter qui figure sur E.S.P., le premier disque du second quintet de Miles. Après une première version du morceau interrompue par Médéric pour excès de vitesse des cors, la seconde a été la bonne, avec accord rythmique retrouvé des deux côtés de la scène. Mais, si la musique était déjà excellente au cours de ce premier set, elle est montée d'un cran pour le second. Le groupe s'est alors penché sur la période électrique du sorcier noir, et notamment ses débuts, autour du répertoire d'In a silent way. Après une Mademoiselle Marby introductive toute en retenue, le groupe, et notamment Médéric Collignon avec ses effets vocaux toujours aussi ébouriffants, s'est lâché sur la relecture enchaînée de Shhh/Peaceful et It's about that time. Dans ce contexte, Franck Woste au Rhodes a lui aussi fait des merveilles. Nappes atmosphériques modales intemporelles ou au contraire poésie de la vitesse et de l'électricité comme symbole de notre présent, il était à l'aise dans tous les facettes de l'hommage. Le Early Minor de Joe Zawinul donnait ensuite l'occasion à Médéric de nous faire apprécier quelques espagnolades au cornet, avant que la mélodie entêtante de Dual Mr. Anthony Tillmon Williams Process ne résonne puissamment, dans une sorte d'envoûtement délicieux où une phrase toute simple, quasi naïve, se répète à l'infini. Même approche, dans une démarche plus dansante et rock, pour la relecture de Black Satin, tiré du délirant On the corner. De quoi permettre à Philippe Gleizes de finir de nous mettre k.o. par sa force de frappe. Le concert s'est achevé par deux rappels : Summertime, réclamé par une partie du public, et un morceau de Billy Cobham, dans la pure veine jazz-rock. Si j'avais déjà vu plusieurs fois Médéric Collignon comme sideman, c'était la première fois que j'assistais à un concert du Jus de Bocse, et la révélation fut pour moi la performance de Franck Woste au Rhodes, instrument parfois ingrat car trop souvent comparé au grand piano. Là, nul besoin de s'adonner au jeu des comparaisons, tant le plaisir que procure le jeu du claviériste allemand est évident et se passe de trop longues réflexions.

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