samedi 17 mars 2007

Marc Ribot's Ceramic Dog @ La Dynamo, mardi 13 mars 2007

Premier concert pour moi cette année dans le cadre du festival Banlieues Bleues. Marc Ribot y présentait son nouveau trio - très rock - avec le bassiste Shazhad Ismaily et la batteur Ches Smith. Une énergie folle, une puissance de feu réellement inouïe, et mine de rien des ambiances parcourues relativement nombreuses : du punk à la poésie beat, de rythmes latinos transfigurés à un folk déglingué, avec même des passages dansants quasi disco ! Le guitariste new-yorkais était en grande forme, poussé par un son de basse entêtant, très sec, et une batterie qui claque de manière très particulière, avec des sonorités souvent métalliques. Les morceaux originaux alternaient avec des reprises diverses et variées : Joe Bataan cotoyant Wilson Picket, la poésie d'Emilio Cubiero les mots de Ribot lui-même. Dans ce registre - comme dans bien d'autres - la guitare de Ribot fait des merveilles, déchire l'obscurité de la manière la plus incisive qui soit, dérape de façon toujours très contrôlée, ou encore se joue des répétitions et des changements soudain de direction. On était certes assez loin du jazz au sens strict, mais un tel concert, qui prend aux tripes de bout en bout, ne pourra que laisser un grand souvenir.

Sylvie Courvoisier & Mark Feldman @ Théâtre de l'Onde, dimanche 11 mars 2007

Un peu moins d'un an après le Sunside déjà en duo, et à peine quelques mois après les passages de Sylvie Courvoisier en solo au Centre culturel suisse (novembre) et en trio avec Ellery Eskelin et Vincent Courtois au Triton (janvier), la pianiste suisse et le violoniste américain se produisaient dans le cadre très détendu des dimanches de l'Onde à Vélizy (collation offerte, et l'occasion de discuter un peu avec Sylvie après le concert). La première partie du concert s'est, une nouvelle fois, organisée autour de compositions de John Zorn extraites du Book of Angels, le second songbook de Masada. Par la suite, les deux musiciens nous ont proposé leurs propres compositions. Dans les deux cas la complicité - des regards, des sourires, de la musique - est l'élément essentiel de leur comportement. Les territoires abordés sont moins abruptes, moins bruitistes, que lors des précédents concerts de la Suissesse évoqués plus haut. Et pourtant, au détour d'un passage au lyrisme quasi romantique, on retrouve l'attachement des deux improvisateurs aux bruits impromptus de la nature ou de la ville. Même si, pour l'occasion, les bagages n'avaient pas suivi et que Sylvie se retrouvait sans ses ustensiles habituels lui servant à explorer l'intérieur du piano. Se jouer des contraintes pour imposer sa liberté : défi amplement relevé, malgré tout, et avec une vraie maestria.

mercredi 7 mars 2007

Anne Paceo Quartet @ Duc des Lombards, lundi 5 mars 2007

Un lundi par mois, la jeune batteuse Anne Paceo a carte blanche au Duc des Lombards. Ce lundi elle avait réuni autour d'elle quelques uns des noms qui ont fait les beaux jours de la La Fontaine pendant près de trois ans : Alexandra Grimal aux saxes ténor et soprano, Yaron Herman au piano et Stéphane Kerecki à la contrebasse. La combinaison Alexandra / Yaron, renforcée par deux esthètes rythmiciens était difficilement résistible. J'y étais donc, et c'était grand !

Ce n'était pas juste un bon concert, c'était véritablement un moment magique, pendant toute la durée des deux sets auxquels j'ai assisté (difficile d'entamer une semaine par trois sets malheureusement). Les compositions étaient exclusivement signées Alexandra et Stéphane Kerecki, à l'exception d'une d'Anne Paceo judicieusement intitulée "les petites choses positives". Les morceaux du bassiste se développaient dans des ambiances joyeuses, très rythmées, au swing contagieux, qui permettaient à Paceo de faire étalage de son talent et de son enthousiasme. Sourire constant au bout des lèvres, elle évoque par cet aspect la joie de vivre hilare d'un Joey Baron. Et ça fait un bien fou ! Les compositions d'Alexandra, que j'apprécie de manière peut-être plus fine par le fait de les côtoyer régulièrement, ont été, au delà des musiciens, les véritables vedettes de la soirée. Rythmiquement, elles s'étirent dans des approches plus accidentées, plus lâches, laissant place aux silences, à la surprise, à l'exploration de bruits atypiques, au murmure et à la respiration. Climats plus intérieurs, plus profonds, plus proches des tripes aussi. Sur ses propres morceaux, Alexandra laisse de la place aux autres, mais quand elle se décide à tenir le discours, c'est en vraie leader - sans écraser personne, laissant son sens de l'espace et du temps particulièrement maîtrisé ce lundi s'exprimer dans toute son ampleur. Bladsurb, qui était présent lui aussi, résume assez bien la forte impression laissée par la saxophoniste. Je n'irai peut-être pas jusqu'à dire que Yaron Herman était pâle, mais il était incontestablement plus au service d'Alexandra qu'à son compte - dynamisant par moment de fort belle manière lesdites compos, sans trop en faire toutefois.

Ce groupe n'est peut-être pas régulier, mais il a incontestablement une cohérence musicale très développée. En espérant que l'envie de prolonger cette invitation d'Anne Paceo donne des idées aux programmateurs, voire aux maisons de disques. En attendant, le concert a été enregistré par France Musique, et devrait être diffusé dans le cadre du Jazz Club, vendredi 6 avril de 23h à 1h.