dimanche 30 avril 2006

François Merville Quartet / David Patrois Quintet @ Radio France, samedi 29 avril 2006

Je ne vais pas assez souvent aux enregistrements publics de France Musique. Il y a pourtant régulièrement, que ce soit pour A l'improviste ou pour Jazz sur le vif, des concerts extrêmement stimulants pour des prix plus que modiques (5€ les samedis après-midi, gratuit le lundi soir). J'y étais tout de même hier pour un hommage du quartette de François Merville à Hermeto Pascoal suivi d'un concert du quintette du vibraphoniste David Patrois.

Le premier groupe proposait une réunion intéressante de musiciens que j'apprécie particulièrement : François Merville, entendu auprès notamment de Louis Sclavis ou Bojan Z, à la batterie, le monomaniaque baby-boomer campagnard Christophe Monniot aux saxophones baryton, alto et sopranino et Gilles Coronado à la guitare. Le quartette était complété par Nicolas Le Moullec, que je ne connaissais pas, à la basse électrique. L'hommage au musicien brésilien abordait plus les expérimentations électriques à la Miles (avec qui Pascoal a joué en 1970) que la jungle fantasmagorique aux accents nordestins développée par ce-même Pascoal. Il faut dire que l'univers musical de l'albinos à la barbe fleurie est véritablement protéiforme. Ainsi, si Christophe Monniot n'hésitait pas de temps à autre à glisser une inflexion typiquement brésilienne au sopranino ou au baryton, l'essentiel de la musique proposée se situait dans la continuité du jazz électrique des early 70s, avec évidemment des éléments plus contemporains, fruits des parcours résolument ancrés dans les musiques actuelles des différents protagonistes de ce groupe. Chaque musicien se trouvait à la tête d'une multitude de pédales d'effets, de claviers aux sons trafiqués et de machines électroniques leur permettant de faire émerger un jazz mutant, tour à tour inquiétant et ludique, qui les situait finalement beaucoup plus dans la descendance de Pascoal que s'ils avaient juste cherché à retranscrire l'univers "brésilien" du compositeur. La rondeur profondément groovante de la basse de Le Moullec couplée aux hachures stressantes de Coronado débouchait sur une sonorité vraiment intéressante, douce amère, entre confort et malaise. Une sorte d'illbient-jazz qui évoquait le caractère inquiétant d'une mégalopole tropicale incontrôlable comme peut l'être, par exemple, Sao Paulo. Monniot apportait lui le zest de fantaisie hors cadre qu'on trouve aussi chez Pascoal, pour qui jouer du verre ou du cochon est aussi naturel que du piano ou de l'accordéon. Enfin, le leader donnait la couleur principale aux morceaux qui se succédaient : parfois particulièrement violents, presque rock, à d'autres moments beaucoup plus dans les bruissements et les susurrements, comme pour reproduire les gazouillis plus ou moins facilement identifiables de la jungle amazonienne. Au total, cela donnait un très bel hommage à la personnalité musicale d'Hermeto Pascoal.

La deuxième partie proposait un groupe qui m'était quasiment inconnu. Seul le nom de Sébastien Llado, au trombone et aux conques marines, m'évoquait quelque chose. J'y allais avec moins d'envie que pour le premier concert du fait de la présence d'un vibraphoniste (instrument avec lequel j'ai du mal) comme leader. Mais, pourtant, ce fut très bon également , dans un style moins expérimental néanmoins. David Patrois ne jouait d'ailleurs pas que du vibraphone, mais aussi du marimba, dont je préfère la sonorité. Il était accompagné, outre Llado, par Jean-Charles Richard aux saxophones baryton et soprano, Pierre Durand à la guitare et Luc Isenmann à la batterie, tous excellents interprètes. La musique jouée avait parfois des accents africains et se situait dans un univers assez proche de ce qu'a pu développer Henri Texier avec des groupes comme l'Azur Quintet ou le Strada Sextet. Autrement dit, mélodique, énergique et qui donne facilement la banane. Les sidemen de Patrois ne se faisaient pas prier pour prendre des solos endiablés enthousiasmants. A tel point que parfois, je dois dire, j'en oubliais presque la présence du vibraphone - ou l'occultait inconsciemment - ce qui accentuait le plaisir. En sortant du studio 108 de la Maison de la Radio on entendait les spectateurs siffler ou chantonner certains des airs du concert, signe d'une certaine réussite. Des musiciens dont il faudra tenter de repérer les noms de-ci de-là à l'avenir en tout cas.

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