Depuis sa réouverture en début d'année, je n'avais jusqu'à présent été à Pleyel que pour des concerts classiques. Samedi, j'y allais pour la première fois pour du jazz : d'abord un solo de Baptiste Trotignon, puis un all-stars européen avec Michel Portal, Louis Sclavis, Bojan Z, Bruno Chevillon et Daniel Humair.
Je n'avais jusqu'à maintenant jamais pris le temps de prêter une oreille attentive à Trotignon. On ne peut pas dire que le concert de samedi m'encourage à y remédier désormais. J'ai trouvé ça d'un ennui intersidéral. On attend qu'il se passe quelque chose, mais malheureusement rien ne vient jamais dans cette musique nombriliste. Le son semble comme contenu dans le piano. Trotignon a bien du mal à emplir l'espace magnifique de la salle Pleyel. Ce jazz aux accents pop et romantiques est quelque chose auquel je n'accroche pas du tout. Si j'en crois les réactions de mon voisin de devant, je n'étais pas le seul à lutter contre l'assoupissement auquel conduit inévitablement cette musique désincarnée.
Quel contraste avec la musique du groupe réuni par Michel Portal ! Ca vit, ça jaillit, ça remplit l'espace. On sent les tripes des musiciens, leur joie de vivre et de jouer. Ce sont certes des musiciens que j'ai déjà vu d'innombrables fois, mais jamais tous ensemble, et surtout jamais avec une telle acoustique. Le plaisir venait ainsi avant tout de la qualité incroyable du son, ce qui donnait une dimension supplémentaire à la musique, sans qu'elle ne perde pour autant rien de sa sauvagerie joyeuse. Portal et Sclavis, clarinette basse et sax soprano tous les deux, sont d'une complémentarité jubilatoire. Sur leurs impulsions conjuguées, la musique tournoie à des vitesses folles, mène une danse espiègle qui habite d'un nouveau jour les thèmes classiques de Portal ou la reprise décalée du Jean-Pierre de Miles. Il y a un aspect cabaret déjanté dans leur jeu pourtant si parfaitement maîtrisé qui contraste formidablement avec le jazz endormi de la première partie.
La section rythmique n'était pas en reste. Là aussi l'acoustique de la salle était la vedette principale. J'ai apprécié le drumming d'une souplesse exemplaire d'Humair comme jamais. Un plaisir constamment renouvelé pour les oreilles. Les arpèges de Bojan et la puissance boisée de Chevillon ponctuaient quant à eux le jeu des trois "vétérans" avec enthousiasme.
Parmi les morceaux joués, l'essentiel était signé Portal, avec des classiques comme Solitudes ou Mutinerie, ou le plus récent Nada Mas. La seule incursion dans le répertoire d'un autre aura été le deuxième rappel : le traditionnel CD-rom conclusive de Bojan Z, transformé en vaste foutoir balkanique sur lequel le bandonéon de Portal et le soprano de Sclavis ont épuisé ce qu'il leur restait de souffle vital. Rien que du connu, mais avec un contexte idéal qui a fait passer le concert à 100 à l'heure.
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