Le concert a commencé par un trio réunissant trois de leurs invités : Christine Sehnaoui, saxophoniste alto parisienne, Clayton Thomas, contrebassiste australien de Berlin, et Wolter Wierbos, tromboniste au pays des tulipes. Sonorités étouffées de la saxophoniste pour commencer, dans un long solo introductif pendant que les spectateurs continuaient d'arriver pour occuper chaque centimètre carré des Instants. Vrombissements et bruitisme pour un free jazz introspectif jouant sur la retenue. Bien loin des explosions qui allaient suivre.
La deuxième partie fut courte, le temps d'un énervement simultané sur trois guitares électriques tenues par Terrie Ex et les deux guitaristes du groupe de rock français Api Uiz. Comme une rasade d'alcool blanc qui nettoie et ravage en même temps.
Place aux mots d'Anne-James Chaton ensuite. Trois poèmes tirés d'un recueil de dix-huit "évènements" ayant pour cadre commun l'année 1999. Énumérations hallucinées de notices, avertissements, prix trouvés sur des tickets de métro, des paquets de cigarettes, un journal, etc. Pendant qu'il déclame ses textes, des phrases répétées en boucle par un sampler donnent une dimension hypnotique à son travail : "Washington s'enlise en Irak", "Rien que la loi" ou "La grande peur du bug de l'an 2000" scandent ainsi de manière mécanique les mots du poète montpelliérain. Plutôt impressionnant.
La suite donna lieu à la seule faute de goût de la soirée : le trio rock Api Uiz, formule basique guitare, basse, batterie, a proposé une musique dont toute subtilité était absente. Ils jouent vite et fort, sans que l'on n'en comprenne l'intérêt. Pendant leur trop longue prestation une "artiste peintre" jetait ses tubes de peinture contre des papiers recouvrant les murs des Instants. Tout ça pour finir dans une bouillie marronnasse, aussi bien picturale que musicale. A oublier.
Retour au calme ensuite avec le chanteur et joueur de masenqo (sorte de violon rudimentaire à une corde) éthiopien Afework Negussie. D'abord pour un morceau en solo, puis en duo avec Katherina, la batteuse de The Ex, et enfin en quartet avec Clayton Thomas et Andy Moor. Grand moment, particulièrement envoutant, qui fait apprécier le drumming chaloupée de Katherina au service de mélopées lancinantes pleine de tezeta, cette sorte de blues des hauts plateaux. Tradition et modernité font bon ménage pour sans doute le meilleur moment de la soirée.
Celle-ci se termine par une prestation de The Ex, d'abord resserré à la formule de base du groupe : les guitares de Terrie et Andy, la batterie de Katherina et le chant de G.W. Sok. Répertoire de tubes, avec l'adjonction progressives de quelques invités : Wolter Wierbos pour une version de "State of Shock" rappelant le lyrisme cuivré du Ex Orkest, puis Clayton Thomas, Christine Sehnaoui et Anne-James Chaton afin de finir la fête comme il se doit. Bien belle soirée. Il n'y aurait pas eu Api Uiz, elle aurait même été parfaite.
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