samedi 8 février 2025

Odeia @ Studio de l'Ermitage, mardi 4 février 2025

Voici un groupe dont j'aime beaucoup les disques, mais que je n'avais encore jamais eu l'occasion de voir sur scène. C'est enfin chose faite grâce au concert de sortie de leur troisième album, Il pleut (Wopela, 2025), dont j'avais participé à la campagne de crowdfunding. Odeia, c'est un trio de cordes - celles de Lucien Alfonso (violon), Karsten Hochapfel (violoncelle et guitare) et Pierre-Yves Le Jeune (contrebasse) - au service de la magnifique voix d'Elsa Birgé. Pour ce troisième album, on retrouve les langues familières de leur répertoire : grec, italien, français essentiellement. La nouveauté vient du choix d'explorer des pièces du grand répertoire aux côtés des mélodies traditionnelles qu'ils ont l'habitude de fréquenter. En l'occurence des airs baroques signés Vivaldi, Scarlatti ou Dowland. 

Le thème commun de ce nouvel album, et donc du concert, ce sont les larmes. Larmes de la douleur de l'exil, quand un napolitain parti trouver meilleure fortune en Amérique pense à la mama, restée là-bas. Larmes du deuil ou de l'épluchure des oignons, seule la chanteuse le sait. Larmes des bas-fonds enfumés du Thessalonique d'il y a un siècle, sur fond de rebetiko. Larmes amères de Scarlatti ou des fontaines tristes de Dowland. Mais larmes de joie aussi, à l'occasion, et en tout cas gaîté et humour entre les morceaux pour expliquer les choix de chansons. 


La voix d'Elsa Birgé captive de bout en bout. Elle allie une grande clarté dans l'expression et une modulation des sentiments qui font de sa prestation une véritable incarnation des mots qu'elle prononce. Son timbre chaud fait merveille quelque soit le matériel, même si, depuis leur premier album, j'ai toujours un faible pour les moments où elle s'empare de le langue grecque. Les trois musiciens qui l'accompagnent tissent un écrin plein d'inventivité, loin de chercher à reproduire à la lettre des airs anciens, mais toujours plein de respect pour le matériau qu'ils attaquent, qu'il soit populaire ou dit savant. Les tourneries dansantes côtoient les complaintes amoureuses sensibles, les chansons à boire ou à fumer, les échappées bruitistes improvisées. En rappel, ils reprennent un morceau de chacun de leur deux disques précédents : Alifib, de Robert Wyatt, et Liouba, un traditionnel tzigane russe, afin d'élargir encore un peu plus le pourtant déjà large spectre de sentiments qu'ils mobilisent. On ne s'en plaindra pas.

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