lundi 6 septembre 2010

Jazzfestival Saalfelden 2010, 4e jour (2/2), dimanche 29 août 2010

Taylor Ho Bynum Sextet, Congress, 19h00

Quelle musique ! Quel groupe ! Quels solistes ! L'intelligence de l'écriture, des arrangements et des combinaisons instrumentales débouche sur un plaisir évident, contagieux. Le sextet assemblé par le cornetiste sert une écriture inventive, originale et moderne, parlant la langue du jazz et lui offrant de nouveaux élans ouverts sur un ailleurs encore vierge. Véritable apothéose du festival, la longue suite de 45 minutes déployée par le groupe joue sur les combinaisons et les timbres des instruments, entre mémoire et inouï. Les solos de sax alto de Jim Hobbs brûlent du souvenir du Liberation Music Orchestra. Le dialogue entre le trombone basse de Bill Lowe et le cornet du leader est tout en subtilité, sourdines partagées et murmures poétiques échangées. La ponctuation de la guitare de Mary Halvorson offre des contrepoints décalés, plongeant l'ensemble dans un équilibre instable dont surgit une séduction vénéneuse, quand la rondeur de la contrebasse de Ken Filiano maintient le lien primordiale avec la terre-mère nourricière. Quant à Tomas Fujiwara, son drive est aussi élégant que son allure. Moteur continu du sextet, il renouvelle le langage de la batterie jazz. Au-delà de l'impression fort agréable de côtoyer la beauté pendant une petite heure, c'est vraiment l'originalité de l'écriture de Taylor Ho Bynum qui fait tout l'intérêt de cette musique. Rien de révolutionnaire en apparence, mais une qualité de renouvellement de l'écoute au fil des minutes grâce à des développements sans cesse surprenants rarement atteinte sur une aussi longue durée. En complément, ils nous offrent des variations autour d'un blues qui laissent entrevoir ce qu'aurait pu produire Mingus à partir du langage du jazz contemporain. La dédicace à Bill Dixon, comme pour l'Exploding Star Orchestra la veille, finit de relier histoire et futur du jazz, dans un élan qui ne se contente ni de l'un ni de l'autre mais embrasse l'ensemble pour faire durer le plaisir du temps présent.


Odean Pope & Odean's List, Congress, 20h30

Après les beautés irisées du setxet de Taylor Ho Bynum, il est quasiment impossible de venir conclure le festival. C'est pourtant la tâche qui incombe au saxophoniste Odean Pope, vétéran de 71 ans longtemps partenaire de jeu de Max Roach. Après avoir exploré pendant quatre jours les possibles du jazz contemporain, le festival s'achève étrangement sur un concert qui rencontre tous les codes (les clichés ?) auquel le grand public aime confiner le jazz : une musique jouée par des afro-américains, un groupe emmené par un leader en âge d'être papy, une section rythmique piano / contrebasse / batterie qui assure le swing et une section de soufflants (deux ténors, un baryton et deux trompettes) qui se relaie au cours de solos démonstratifs. Sans doute pas pour dire ce qu'est le jazz, mais plutôt pour affirmer, c'est aussi ça le jazz : un lien avec une tradition séculaire, forgée aux côtés de grands disparus comme semblent en témoigner les hommages à Max Roach et George Russell, ou ce morceau modal aux reflets espagnols qui évoque avec élégance Sketches of Spain ou Olé. Le tout est quand même un peu trop respectueux des fameux codes à mon goût, et est bien loin de procurer, une nouvelle fois, l'envie de prolonger le plaisir. C'est peut-être aussi en cela une forme de conclusion.

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A voir ailleurs : vidéos des concerts sur le site roumain MuzicaDeVest.
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1 commentaire:

George a dit…

Thanks a lot for the link, perhaps we can meet sometimes ina jazz festival