L'Opéra Bastille propose en ce moment une série de représentations du dernier opéra de Leos Janacek, De la maison des morts, d'après le roman autobiographique de Dostoïevski sur ses années passées dans un camp de travail de Sibérie, Souvenirs de la maison des morts.
Janacek est l'un de mes deux ou trois compositeurs préférés, et la représentation d'hier soir l'a confirmé de la plus belle des manières. Cette musique touche au sublime, que ce soit dans le rendu de l'oppression dans l'acte I, ou dans le retour perpétuel du violon solo au phrasé très janacekien, sans oublier la force de la scène finale qui glorifie la liberté. Le compositeur morave a peu d'équivalents, il ne se rattache véritablement à aucune école. Il est à la fois étonnament moderne, par son usage des ruptures et du "décousu", et profondément ancré dans les traditions de son pays, notamment grâce à son travail sur le phrasé, mélodique et rythmique, de la langue tchèque, qui influence une grande partie de son oeuvre. Un travail qui trouve évidemment tout son sens dans ses opéras, et dans celui-ci en particulier. Sans rien comprendre au tchèque (qui plus est chanté), la musique souligne si subtilement le récit que l'on devine parfois le sens du discours avant que les surtitres n'apparaissent (ça aide de connaître l'histoire auparavant ceci-dit).
Par ailleurs, la mise en scène assez classique de Klaus Michael Grüber et les décors dépouillés dus à Eduardo Arroyo collent parfaitement avec la musique, et avec "l'ambiance" du texte de Dostoïevski. Ce n'est pas ici une vision prophétique de l'univers concentrationnaire, mais au contraire une approche terriblement humaine de l'univers du bagne, où la rédemption n'est jamais loin. Les décors apportent ainsi la touche finale au succès de cette représentation qui restera comme l'un des plus beaux opéras qu'il m'ait été donné de voir.
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Il y a 23 heures
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