Un peu étonnamment, c'est seulement la première fois que j'assiste à un concert du Sacre du Tympan, alors que je suis le groupe à géométrie variable de Fred Pallem depuis leur premier album, paru en 2002 (déjà !). A l'époque, il apparaissait comme un véritable who's who de la jeune génération du jazz français, tout juste sortie du CNSMDP. Plus de deux décénies plus tard, le groupe continue d'exister, ayant publié plus d'une dizaine de disques au fil des ans. Parmi les influences revendiquées de Fred Pallem, il y a les musiques de film d'une part et la science des arrangeurs pop français (Jean Claude Vannier, André Popp...) de l'autre. Quoi de plus normal que de le voir aborder alors la musique de François de Roubaix. Cela avait commencé il y a dix ans avec la parution d'un disque (Fred Pallem & Le Sacre du Tympan présentent François de Roubaix, Train Fantôme, 2015) qui mettait à l'honneur quelques mélodies, célèbres ou moins, du compositeur surtout connu pour ses musiques de film (Dernier domicile connu, Le vieux fusil, Le samouraï et même... Chapi Chapo !). Alors que l'on commémore les cinquante ans de sa disparition, Fred Pallem remet donc ça pour deux soirs au Café de la Danse. J'y étais le deuxième, et la salle était très remplie.
Le disque mêlait compositions purement instrumentales et chansons, le concert se concentre sur les premières uniquement. Le disque présentait un groupe au format resserré autour du couple basse-batterie et des synthétiseurs, le concert élargit le spectre sonore grâce à douze musiciens. Au format de base s'ajoutent ainsi un quatuor à cordes, trois cuivres et une guitare. On retrouve des fidèles de la première heure (déjà présents sur le premier disque de 2002) : Vincent Taeger à la batterie, Rémi Sciuto aux saxophones, flute et synthés, Ludovic Bruni à la guitare, Daniel Zimmermann au trombone ou Renald Villoteau au tuba, mais aussi des noms plus récents, tels Bettina Kee aux claviers, Jules Boittin au trombone basse et les cordes d'Anne Le Pape (violon), Aurélie Branger (violon), Camille Chardon (alto) et Solène Chevalier (violoncelle). Certains musiciens déjà vus cette année en concert, d'ailleurs, tels Bettina Kee et Vincent Taeger en janvier aux côtés de Sylvain Rifflet, ou Rémi Sciuto et Anne Le Pape en septembre au sein de l'ONJ. Et pour Bettina Kee, elle était même du dernier concert vu au Café de la Danse (2014) avec le groupe de Denis Colin reprenant l'univers de Nino Ferrer !
Le concert se déroule en deux sets pleins (une heure chacun) permettant d'explorer plus de morceaux que sur le disque de 2015. Fred Pallem nous dit qu'il s'est même autorisé à créer des suites mélangeant plusieurs thèmes de De Roubaix. On retrouve le goût des synthés bidouilleurs, tour à tour mystérieux, ludiques ou enivrants dont De Roubaix avait fait sa marque de fabrique. Des mélodies pop simples qui collent immédiatement à la mémoire, à tel point qu'on a souvent l'impression d'un "déjà entendu" sans même avoir forcément vu les films qu'elles illustraient. Sur ce matériau de base, la science des arrangements de Fred Pallem fait des merveilles. On a des cordes soul qui rappellent le meilleur de la production américaine des 60s/70s (coucou Burt Bacharach), une guitare psychédélique qui électrise l'ambiance, des cuivres qui donnent de la profondeur aux morceaux, une rythmique funky assurée par la paire Pallem/Taeger, des flûtes enchanteresses qui donnent une dimension pastorale à certains titres... Bref, c'est varié, tout en maintenant une unité de style qui nous embarque pendant deux heures. Même les compositions signées de la main de Fred Pallem s'inscrivent parfaitement dans le décor (dont The Naked Bath, tirée de l'album Soundtrax, 2010, dont le titre dit tout de l'ambition).
Mention très spéciale à Rémi Sciuto qui alterne entre synthé, flûte, sax alto ou soprano, voire ocarina, avec toujours une musicalité juste à propos. C'était déjà lui qui était aux arrangements du programme de l'ONJ sur la musique de Carla Bley en septembre. Je l'avais souvent vu en concert dans les années 2000 (Grupa Palotaï, Campagnie des Musiques à Ouïr, Wildmimi...) mais beaucoup moins ensuite. Ca fait plaisir de le retrouver ainsi !

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