lundi 9 septembre 2013

John Zorn Marathon - 60th Birthday Celebration - Part 2 @ Grande Halle de la Villette, samedi 7 septembre 2013

Le temps d'avaler quelque chose chez un traiteur vietnamien du quartier, et il est déjà l'heure de faire la queue pour éviter de se retrouver trop haut placé dans les gradins de l'espace Charlie Parker de la Grande Halle, où se déroule la deuxième partie du marathon à partir de 19h.

Après les compositions contemporaines, cette deuxième étape fait la part belle à Zorn le coloriste et le mélodiste. Les quatre groupes qui se succèdent empruntent à divers style musicaux (jazz, klezmer, exotica, surf...) mais placent tous en leur centre de simples et belles mélodies servies par un gout certain pour les dynamismes chatoyants et les contrastes appuyés.

Le premier ensemble à se présenter sur scène est The Concealed, soit les cordes de Mark Feldman (vln), Erik Friedlander (vcl) et Trevor Dunn (cb) accompagnées par le piano de John Medeski et les percussions de Cyro Baptista, Kenny Wollesen (vib) et Joey Baron (dms). Les mélodies voyagent du côté de l'orient fantasmé - mais pas nécessairement sur un mode hébraïque. Contrairement à la première partie où seule la partition servait de guide aux interprètes, Zorn est désormais sur scène pour diriger la musique. Pour cette entrée en matière, il ne pousse cependant pas ses compagnons dans leurs retranchements, se contentant de les accompagner de quelques gestes vers des destinations évidentes. Du coup - et notamment comparé à ce qui va suivre - cela manque un peu de relief. La musique est cantonnée à un registre trop étroit - gammes mineures aux couleurs vaguement moyen-orientales - qui ne permet notamment pas aux cordes de faire ressortir tout le tranchant dont elles sont capables dans d'autres contextes.

Le plaisir monte brusquement d'un cran quand Dave Douglas (tp) et Greg Cohen (cb) rejoignent Zorn et Baron sur scène pour une courte mais intense prestation de Masada. Si le saxophoniste - qui souffle pour la première fois de la soirée dans son instrument - fête ses soixante ans, le quartet célèbre par la même occasion ses vingt ans d’existence puisque le First Live, enregistré à la Knitting Factory, remonte à septembre 1993 (même si la première réunion, sous le nom de Thieves Quartet, date en fait de juillet 1993, pour l'enregistrement d'une BO loin de la thématique juive). Le temps imparti étant compté, le quartet ne prend pas le temps d'un round d'observation et nous propose en accéléré tous les ingrédients qui font sa singularité : jeu à mains nues sur les peaux de Joey Baron, solos incisifs des souffleurs, chant profond de la contrebasse, explosions joyeuses ponctuant les douces mélopées hébraïsantes, et pour le coup un vrai sens des contrastes qui donne beaucoup de relief à la musique.

Relief, contraste, couleurs, c'est aussi ce qui caractérise la prestation de The Dreamers qui suit. Comme à Lisbonne il y a un mois, c'est beaucoup moins easy listening que les enregistrements sur disques. Zorn appuie sur les angles pour faire ressortir toute l'énergie rock dont est capable l'ensemble. Marc Ribot retrouve la place centrale qu'il m'avait semblé un peu délaisser lors des concerts portugais. Peut-être est-ce dû au format "marathon" qui oblige à condenser le propos pour aller immédiatement attaquer la substantifique moelle de chaque formation. Cyro Baptista, Kenny Wollesen et Joey Baron ont par bonheur plus de place que dans The Concealed pour réhausser de rythmes pimentés la potion magique zornienne. Particulièrement chatoyante, la prestation du groupe file à 100 à l'heure et on a à peine le temps de l'applaudir chaleureusement que Zorn passe déjà à l'étape suivante.

Imprévu au programme, le New Yorkais revient avec les cordes de Mark Feldman, Erik Friedlander et Greg Cohen pour les associer à Ribot, Baron et Baptista, soit le Bar Kokhba Sextet. S'ils semblaient un peu corsetés en début de concert, ils peuvent désormais faire preuve d'un lyrisme acéré, malgré le fou rire de Ribot, complètement largué par cet appendice inattendu. Les deux morceaux interprétés par l'ensemble sont néanmoins de haute volée, offrant un complément idéal à cette deuxième partie pleine de couleurs.

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