Le titre de la pièce est un sigle phonétique qui fait référence à l'Inquisition. Ritualiste, le théâtre de Wayn Traub abonde en références religieuses - visuelles, thématiques. Aucun rapport, ceci-dit, avec la véritable Inquisition ici. Il s'agit plutôt d'un questionnement critique sur nos propres faiblesses, le résultat d'une inquisition intérieure et personnelle, qui peut prendre la forme de la psychanalyse. L'un des trois personnages (pour quatre acteurs) de la pièce tient d'ailleurs occasionnellement le rôle d'une psychanalyste. Quatre acteurs (plus des apparitions muettes et masquées de Wayn Traub lui-même dans les passages chorégraphiés), trois personnages et des rôles multiples pour chacun. Trois histoires qui n'en font en fait qu'une à la fin : une fable médiévale autour de l'amour éternel, un conte futuriste autour d'une variation sci-fi du mythe d'Orphée, et donc la psychanalyse d'un professeur émérite. Le professeur, le jeune amant de la fable et l'astronaute perdu dans l'espace à la recherche de sa bien-aimée ne font en fait qu'un (interprété par deux acteurs). La narratrice de la fable, le Malin et la psychanalyste ne sont également qu'un seul et même personnage. Tout comme l'amante de la fable et la femme du professeur, danse-thérapeute déjantée. Trois personnages, trois couleurs : noir, rouge et blanc respectivement. Les jeux visuels autour de ces couleurs et du rapport entre la lumière et l'obscurité sont d'une grande beauté. Ils donnent une incontestable force à la mise en scène.
Toute l'action semble au final s'être déroulée dans la tête du professeur - ou au moins dans le cabinet de sa psychanalyste. On comprend peu à peu que la fable médiévale et le conte de science-fiction sont des allégories et des fantasmes liés à l'histoire du professeur et à sa relation à sa femme. Le propos de Wayn Traub, et de l'auteur Paul Pourveur, interroge notre sens du sacrifice, notre relation à l'animalité, à la danse, ou encore au mythe de l'amour éternel. En conservant une part de mystère, d'inexpliqué, en préférant les questions au réponses, Wayn Traub semble faire l'éloge de la grandeur de la religion (ouverture sur l'infini), dans un contraste saisissant avec la référence du titre (recherche de l'aveu).
Le récit est entrecoupé de passages chorégraphiés au rythme d'une musique mêlant l'ancienneté solennelle de l'orgue et les cliquetis futuristes des ordinateurs. Ces passages sont aussi l'occasion de nombreux jeux de lumières, variations autour des couleurs des personnages, qui mettent en avant l'importance de l'œil dans le théâtre de Traub.
On rit aussi à l'occasion. Grâce à quelques réflexions du professeur sur la perception de l'amour chez l'homme et le refus de l'animalité dont cela témoigne, ou face aux numéros de danse-thérapie de la femme du professeur. Et pourtant, ces remarques humoristiques seront à l'origine de la fin douloureuse de la pièce. Comme si Wayn Traub cherchait à se moquer des affirmations trop péremptoires pour laisser la place au doute. Là aussi, grandeur et misère de la religion.
Quelque peu ésotérique au départ, N.Q.Z.C. trouve progressivement sa cohérence et illustre parfaitement la dimension ritualiste du théâtre. Comme un pont jeté entre les racines antiques de cet art et son futur entrevu par Wayn Traub. Nova et vetera, comme disent les Évangiles.
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