Suite à une discussion sur les femmes dans le jazz sur le forum de Citizen Jazz, nous étions plusieurs à nous retrouver pour le concert de la jeune pianiste canadienne Kris Davis en duo avec le contrebassiste autrichien Peter Herbert samedi soir aux 7 Lézards. Double découverte à vrai dire puisque le contrebassiste, bien que plus âgé, n'avait jusqu'à là pas encore atteint mes oreilles.
Le concert s'est déroulé en deux sets avec trois morceaux chacun, répartis équitablement entre pièces totalement improvisées (deux lors du premier set, une lors du second), compositions de Kris Davis (une dans chaque set) et reprise de Footprints de Wayne Shorter (en ouverture du second set). Dans les pièces improvisées, Peter Herbert mène le discours. Il est le plus intéressant, le plus varié dans sa technique comme dans ses sonorités. C'est lui qui maintient le suspens et la surprise sur ce qui va suivre, quand la pianiste a parfois un peu de mal à sortir de phrases qui semblent toutes faites. On sent qu'elle cherche à développer un discours en cohérence avec son partenaire d'un soir. S'il y a quelques beaux passages, quand elle prend le temps de dérouler sa musique en de longues phrases au développement lent, la plupart du temps elle se perd un peu dans des séquences saccadées dont l'originalité n'est pas la caractéristique première. Peter Herbert, lui, use de tous les possibles offerts par son instrument : en pizzicato ou à l'archet, bien entendu, mais également en tapotant ou en frottant le bois de sa contrebasse, ou en distordant les cordes à l'aide de bâtonnets ou de pinces à linge. Dans sa démarche, il m'évoque souvent Joëlle Léandre.
Lors des morceaux plus structurés - ses propres compositions ou celle de Shorter - Kris Davis semble plus à l'aise, plus libre - paradoxalement - de développer un jeu original. L'aide d'une rythmique préétablie lui permet de jouer autour, dans des phrases aux accents monkiens sur 35 cents (au cours du premier set) ou au déroulement plus contemporain ailleurs. Le contrebassiste reste dans la même optique que lors des pièces improvisées, apportant une dimension un peu hors cadre à la musique jouée qui offre un intéressant contrepoint au jeu de la pianiste. Dans ce cadre, on sent plus d'interaction entre les deux musiciens, comme si les repères offerts par la musique leur permettaient d'être plus à l'écoute l'un de l'autre, leur ôtant la préoccupation du "quoi dire ?" solitaire.
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Il y a 14 heures
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