Trois mois après leur version superlative des Vêpres de la Vierge de Monterverdi, Raphaël Pichon et son ensemble Pygmalion étaient de retour sur la scène de la Philharmonie pour interpréter une autre oeuvre mêlant le sacré au profane. Alors qu'ils viennent de publier au disque leur version du Requiem de Mozart, c'est à une autre messe des morts qu'ils s'attaquent ce soir, Un requiem allemand de Brahms. Sacré et profane, car si le matériel de base est tiré de passages bibliques, on ne retrouve pas les habituelles prières d'un requiem, et le compositeur envisageait son oeuvre comme devant être donnée en concert plutôt qu'en support à la liturgie.
Raphaël Pichon choisit de faire précéder le requiem par une oeuvre chorale de Mendelssohn, Mitten wir im Leben sind, extraite des Kirchenmusik. Musique purement chorale (sans support instrumental), elle fait d'abord se répondre voix masculines, ténors et basses, et féminines, mezzos et sopranos, avant que les pupitres ne se mêlent dans un élan plein d'espoir. A la fin de la pièce, Pichon retient son geste pour maintenir le silence, toutefois interrompu par quelques tentatives d'applaudissements et les habituels tousseurs des concerts hivernaux. L'effet d'enchaînement avec la pièce de Brahms ne s'en trouve pas pertubé, même si quelques spectateurs sans doute un peu perdus lanceront à nouveau une tentative d'applaudissements à la fin de la première partie du requiem.
Comme lors du concert de septembre, la direction de Raphaël Pichon me frappe par le décalage appararent entre la vue et l'ouïe. Gestes secs, énergie expressive, il semble parfois comme sur ressort mais le rendu à l'oreille est parfait de nuances et souligne à merveille les contrastes de la partition. Le choeur est véritablement au centre de l'oeuvre et sa maîtrise parfaite des différentes émotions nous fait partager deuil et espoir, recueillement et allégresse, comme rarement. S'il y a bien deux voix solistes, et non des moindres en les personnes de Sabine Devieilhe, soprano, et Stéphane Degout, baryton, leurs interventions se fondent dans l'ensemble et n'éclipsent en rien la performance collective. L'ensemble instrumental - sur instruments d'époque - sait exploser juste ce qu'il faut dans les moments les plus puissants, avant de revenir se mettre au service du choeur et de la partition. Alors que la dernière note du septième mouvement finit de retentir, cette fois-ci c'est la bonne pour les applaudissements qui peuvent enfin saluer de manière nourrie une nouvelle performance impressionnante de l'ensemble Pygmalion.
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