Reggie Washington revenait au Triptyque hier soir, quelques mois après son précédent passage, à la tête d'un nouveau trio composé du claviériste Jozef Dumoulin et du batteur Skoota Warner. Je ne connaissais pas ce dernier, mais la perspective d'entendre Dumoulin, qui m'avait fait grosse impression aux côtés d'Alexandra Grimal en août, se frotter à la science du groove du bassiste était assez alléchante.
Le premier morceau m'a un peu fait craindre que le son typique de Washington ne laisse pas assez de place à l'art du hors cadre du claviériste belge : ambiance funk au rythme très droit, avec un Skoota Warner dont on sent qu'il vient du rock. Ca tourne rond, de manière trop parfaite. Mais, dès le deuxième morceau, mes doutes s'envolent. Jozef Dumoulin fait irruption dans le groove à la tête de sons de cloches métalliques permis par son Fender Rhodes trafiqué et déconstruit en direct les rythmes proposés par ses deux complices. Le contraste entre les bruitages soniques du claviériste et le rythme lourd et entêtant du couple basse-batterie permet l'élaboration d'une musique ambitieuse, qui n'oulie ni le plaisir du groove régulier ni celui des breaks inattendus.
Même s'il était sans doute moins libre - car devant jouer dans un cadre plus strict - qu'en août dernier, Jozef Dumoulin a quand même pu confirmer son talent loin des habitudes sur le rhodes. Il en tire des sons qui peuvent tour à tour servir de perturbateur au discours principal ou au contraire prendre la place centrale, avec alors la régularité du groove comme élément contrastant d'ordre secondaire. C'est dans cette inversion des rôles que le trio est le plus convaincant, car le plus original. Reggie Washington, dans ce cadre, sort parfois de sa pure obsession groovante pour lui aussi désorganiser son discours et manier l'art du break. Seul Skoota Warner reste alors dans son rôle traditionnel, pour relancer sans cesse la machine et permettre au groupe de retomber sur ses pattes après ses dérives inattendues.
Le répertoire était essentiellement signé Reggie Washington, avec toutefois une incursion chez Wayne Shorter et une autre chez Gainsbourg, avec une reprise du Requiem pour un con pour conclure le concert. Une jolie reprise qui commence sur le rythme électro-funk de la seconde version de la chanson (celle de 1991 - la première date de 1968) pour aller vers des variations moins sages sur les lignes mélodique comme rythmique.
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