vendredi 18 octobre 2024

Yaron Herman New Quartet @ Sunside, vendredi 11 octobre 2024

Il flottait comme un air de La Fontaine au Sunside vendredi dernier. Pendant quelques années, au mitan des années 2000, La Fontaine, un bar du 10e arrondissement, a accueilli des concerts de jazz et a surtout permis de faire éclore toute une génération de jeunes musiciens, parmi lesquels Yaron Herman et Alexandra Grimal, qu'on retrouvait donc sur la scène du club de la rue des Lombards pour ce nouveau quartet du pianiste. Symboliquement, le dernier concert de La Fontaine, en septembre 2006, fut un concert de Yaron Herman, auquel Alexandra Grimal s'était jointe pour le dernier morceau. Je les avais revus ensemble l'année suivante, dans un quartet emmené par Anne Pacéo - elle aussi lancée dans le grand bain par les concerts à La Fontaine - au Duc des Lombards, autre club de la rue du même nom. Je garde un vif souvenir de ce concert, comme mes notes de l'époque en témoignent encore. Depuis, j'ai souvent revu Alexandra en concert, dont la dernière fois il y a un peu moins d'un an. J'ai moins eu l'occasion de revoir Yaron depuis cette époque des années 2005-2007, mais ai quand même profité de la venue de son trio en terres tchèques (2019) lors de mon exil praguois pour renouer un peu le fil avec sa musique. L'annonce de ce concert les réunissant avait donc un double intérêt : celui d'évoquer le souvenir de ces années de découverte de toute une nouvelle génération (en l'occurence, la mienne), dont les archives de ce blog témoignent largement, mais aussi, et surtout, l'envie de découvrir la musique qu'ils font aujourd'hui, nourrie d'expériences qui n'ont pas spécialement convergées - en tout cas sur le papier - au cours des deux dernières décénies. 

Le nouveau quartet de Yaron Herman compte aussi en ses rangs un complice de longue date du pianiste, le batteur Ziv Ravitz, qui accompagne Yaron sur scène et sur disque depuis maintenant plus de dix ans (il était lui aussi du concert de Prague évoqué plus haut). Plus récent auprès de Yaron, le contrebassiste Haggai Cohen-Milo complète le groupe. Je l'avais pour ma part découvert grâce à la parution sous son nom de l'avant-dernier volume de la Radical Jewish Culture series de Tzadik. Un album sur lequel le batteur n'était autre que Ziv Ravitz d'ailleurs. 

La musique jouée vendredi dernier portait la marque évidente de Yaron Herman, avec des compositions mêlant groove imparable, mélodies d'inspiration folklorique, sens des contrastes et jeu sur les vitesses sur lequelles chacun pouvait briller tour à tour. Yaron en entamant délicatement en solo le premier morceau semble vouloir suspendre le temps, avant qu'Alexandra puis les autres ne le rejoignent pour densifier le propos et déboucher sur une cavalcade enfiévrée. Le rythme des morceaux est souvent enlevé, mais cela n'empêche pas les nuances, ni la grande maîtrise formelle dans leur déroulé. Alexandra Grimal ne joue que du ténor pour l'occasion, et dans une approche beaucoup plus straight que lorsqu'elle propose sa propre musique, mais son constant équilibre entre in et out ajoute une dimension supplémentaire, entre force et fragilité, qui fait d'autant mieux ressortir, par contraste, le sens du groove que les trois autres s'évertuent à maintenir en permanence. Ces quatre là devraient se retrouver sur le prochain album du pianiste, annoncé pour début 2025. Alexandra partagera le pupitre du saxophone avec Maria Grand (vue aux côtés de Steve Coleman comme de Mary Halvorson), qui était annoncée pour le concert du dimanche soir de ce quartet. Mais je n'y étais pas, il faudra donc attendre le support discographique pour pouvoir entendre comment chacune nourrie la musique de Yaron Herman de leurs expériences diverses. 

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