dimanche 17 février 2008

Anne Teresa De Keersmaeker - Steve Reich Evening @ Maison de la Musique, samedi 16 février 2008

Un mois après Zeitung au Théâtre de la Ville, nouvelle occasion de voir la compagnie Rosas en action, avec son programme autour de musiques de Steve Reich présenté à la Maison de la Musique de Nanterre. Ça commence par la Pendulum Music, installation pour deux micros se balançant au-dessus de deux haut-parleurs, qui provoquent ainsi des effets larsen à intervalles réguliers, de plus en plus rapprochés. Pas de danse, à peine de la musique, mais déjà du mouvement.

Après cette introduction, deux musiciens de l'ensemble Ictus viennent jouer Marimba Phase, pièce pour deux marimbas dans le plus pur style reichien : légères variations, vitesse d'exécution, contrepoint rythmique serré. Sensation de spirale infernale. Arrive enfin la danse avec la pièce suivante : Piano Phase, la même musique, mais pour deux pianos. Deux danseuses, portant la même robe, arborant une identique queue de cheval (une brune, une blonde), sont face à un écran blanc sur lequel sont projetées leurs ombres dédoublées. Au centre de l'écran, l'ombre de gauche de la danseuse de droite se superpose à l'ombre de droite de la danseuse de gauche. Les mouvements sont simples, minimaux : balancement régulier du bras, rotation à 180° régulière et asynchrone des deux danseuses, déplacement téléguidé par la musique, léger pas de danse déviant, et on recommence. Lumières et couleurs minimales, elles aussi, noir et blanc. Gris, à la limite. Cette chorégraphie date de 1982, naissance du langage de De Keersmaeker, mais on y trouve déjà les éléments les plus caractéristiques de la flamande.

Viennent ensuite deux créations récentes (l'année dernière), toujours sur des musiques de Steve Reich. Tout d'abord Eight Lines pour huit danseuses, puis Four Organs pour cinq danseurs. Adéquation numérique de la musique et de la danse (puisque Four Organs est en fait pour quatre orgues hammond et des maracas). La pièce féminine se construit autour de la figure du cercle. Les danseuses entrent et sortent tour à tour de celui-ci, se croisent, sautent sur place, repartent, reviennent, tournent dans un sens, dans l'autre, prennent la tangente et les diagonales, suivant l'ostinato obsessionnel de la musique. Six sont en robes, deux en pantalons. Deux sont en noir, six en blanc. Musique pour deux pianos et six autres instruments (la seule enregistrée de la soirée). Prenant. La pièce masculine me plait moins. Côté musique, comme côté danse. Un danseur reste constamment à l'écart de l'action des quatre autres (figure-t-il les maracas face aux quatre orgues ?) avec un langage corporel minimaliste. Les autres se frôlent, s'empoignent, sans qu'un schéma général ne semble apparaître.

Interlude ligetien, ensuite, avec le Poème symphonique pour cent métronomes réalisé in situ par cent métronomes (je les ai comptés !) lancés par des danseuses. Masse sonore crépitante qui s'individualise et ralentit au fur et à mesure. Un spectateur particulièrement enthousiaste se lève en criant un retentissant bravo à l'arrêt du dernier.

Retour à Steve Reich, enfin, avec la dernière pièce au programme, Drumming part 1, pour quatre percussionnistes et influencée par les rythmes africains (composée suite à un voyage au Ghana). La chorégraphie, pour les huit danseuses et les cinq danseurs, date de 1997. Elle regagne en intérêt, dans un style proche de Eight Lines, en moins léché néanmoins. Profusion rythmique et sonore qui se retrouve dans les mouvements perpétuels des va-et-viens des danseurs, avec quelques passages solitaires de Cynthia Loemij d'une grande pureté. En bis, les musiciens d'Ictus reviennent jouer des claves sur scène, et les danseurs exécutent, tout sourire, quelques pas issus des chorégraphies de la soirée, pour le plus grand bonheur du public. Encore une bien belle soirée due à Rosas. Quant à Ictus, ils seront de nouveau à Nanterre, en compagnie d'Octun, fin mars. Ça promet !

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