Hier soir au Point Ephémère, le guitariste David Chevallier présentait son projet "The rest is silence" sur des poèmes de Cesare Pavese. A la manière des Lieder des compositeurs classiques, il a décidé de mettre en musique tout un recueil du poète italien : Verra la morte e avra i tuoi occhi (la mort viendra et elle aura tes yeux). La musique qu'il a composée pour l'occasion est d'ailleurs plus proche de la musique de chambre contemporaine que de l'univers du jazz qu'il fréquente habituellement. Pour être plus précis, David Chevallier a écrit des musiques interprétées par l'Ensemble Octoplus, neuf musiciens de formation classique (violon, alto, violoncelle, contrebasse, flûte, hautbois, clarinette, basson et cor). En plus de ces orchestrations classiques, David Chevallier a réuni son quartet jazz habituel, Les Pyromanes (Yves Robert au trombone, Michel Massot au tuba, Denis Charolles à la batterie et le leader aux guitares), chargé d'improviser sur la musique jouée. Enfin, pour interpréter les textes, c'est à l'inclassable Elise Caron que David Chevallier a fait appel.
Le résultat est assez somptueux il faut dire. Et, dans un lieu plus habitué aux décharges bruitistes qu'aux subtils arrangements classiques, l'ingénieur du son a réalisé une belle performance, permettant une restitution très juste des multiples nuances de l'orchestration.
Le concert s'est ouvert et s'est conclu sur deux poèmes chantés en anglais, alors que tous les autres étaient laissés en version originale, et donc en italien. La voix d'Elise Caron est toujours aussi délicieuse, mettant juste ce qu'il faut de lyrisme noir et d'ironie amusée dans son interprétation des textes de Pavese. L'alliage des timbres, cordes, bois et cuivres, classiques et jazz, permet une grande variété d'approches, même s'il y a une indéniable unité de la musique proposée. Ainsi, sur un morceau, le quatuor à cordes est mis en avant, sur un autre ce sont au contraire les cuivres des "jazzeux", parfois le format se resserre (duo guitare/voix, trio trombone/batterie/voix...), à d'autres moments les quatorze musiciens allient leur effort. On passe aussi à travers diverses ambiances. Il y a un côté joyeux qui emprunte aux musiques des films de Fellini ou à Kurt Weill, mais il y a parallèlement un côté assez sombre, qui exprime bien le thème récurrent de la mort présent dans le recueil mis en musique. Et, avec des musiciens comme Denis Charolles, Yves Robert ou Elise Caron, il y a aussi, nécessairement, de l'humour un peu potache, comme lorsque le tromboniste s'amuse à imiter une mouche ou qu'Elise Caron part sur des onomatopées délirantes. Bref, un spectacle complet, qui mèle beaucoup d'émotions diverses, mais au service unique des sentiments des spectateurs.
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